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Arthur Germain va descendre la Seine à la nage : « 52 jours pour mieux comprendre comment protéger la nature »

03 juin 2021 - Julie Hervault - Temps de lecture : 6 min

Plenitude, Énergie, Électricité, Arthur Germain va descendre la Seine à la nage

À 19 ans, Arthur Germain se lance le défi de descendre les 784 kilomètres de la Seine à la nage, en autonomie et sans assistance. Trois ans après avoir traversé la Manche à la nage, l’aventurier souhaite faire de son défi sportif un acte militant pour la protection du fleuve et de ses écosystèmes, et montrer une nouvelle manière d’appréhender la nage en eau libre. Par son aventure, il entend mettre en lumière la question de la préservation de l’eau, de l’écosystème des fleuves, et montrer que chacun, à son niveau, peut s’engager pour la planète. Interview d’un sportif humain et engagé.

Arthur, que ressent-on à quelques jours du départ de la Seine à la nage, aventure que personne n’a encore réalisée ?

Arthur Germain : Je suis impatient de me jeter à l’eau, au propre comme au figuré, car je me sens réellement prêt mentalement. Je n’ai plus que ça en tête ! Bien sûr il y a tous les à-côtés, l’attente, la préparation, l'ambiance générale qui est un peu stressante mais je gère bien, je suis très bien entouré.

Comment t’est venue cette idée un peu folle ? Et pourquoi avoir choisi la Seine ?

Arthur Germain : La Seine est un fleuve assez particulier pour moi, tout d’abord parce que je suis Parisien : j’ai grandi à ses côtés. J’ai aussi eu plusieurs expériences en contact direct avec la Seine, notamment avec la fondation Tara Océan où j’ai pu approfondir ma connaissance du milieu et prendre conscience des enjeux climatiques liés à son écosystème. C’est justement ce travail de sensibilisation à destination du grand public qui a été le déclencheur de cette aventure. Nager dans la jungle vers Troyes, sous la Tour Eiffel, puis arriver au Havre et me rapprocher de la Manche… Ce sont des choses qui me parlent énormément.

citationTout le sens de mon projet est de savoir comment, à mon échelle, je peux améliorer la vie des gens et lutter contre le changement climatique.

Tu vas réaliser cette aventure en totale autonomie : pourquoi ce choix ?

Arthur Germain : La première raison touche le message que je souhaite faire passer. Je souhaite être proche du fleuve, atteindre au cours de mes journées dans l’eau un état proche de la méditation afin d’apprendre à mieux me connaître moi, mais aussi apprendre à le connaître lui, l’écosystème de la Seine. C’est en quelque sorte un défi mental car je ne peux me reposer sur personne d’autre. Pour autant, j’ai travaillé avec toute une équipe en phase de préparation, j’ai rencontré de nombreuses personnes avec qui j’ai énormément appris. Tout le sens de mon projet est de savoir comment, à mon échelle, je peux améliorer la vie des gens et lutter contre le changement climatique. Je ne sais pas si j’aurai des réponses mais je veux avancer sur ces questions.

D’où vient ton engagement pour la cause environnementale ? Concrètement, comment comptes-tu la partager avec le grand public ?

Arthur Germain : Mon défi, c’est d’abord l’enjeu environnemental et comment transmettre mon message d’écologie positive. Tout le projet s’est construit autour de ça. J’ai toujours eu une certaine sensibilité pour la nature et l’écologie mais il y a eu des déclics car je n’ai pas toujours été un écolo au quotidien. J’ai changé de mode de vie après une expérience au Sénégal avec l'association Les reflets de l’eau qui apprend aux femmes et enfants à nager. Lors d’une course entre Dakar et l’île de Gorée, nous étions plus de 600 à nager dans l’eau salée au milieu des bouteilles et des sacs plastiques, à quelques dizaines de mètres des bateaux qui déversaient leur essence. Je suis rentré à Paris et j’ai vu la même chose dans la Seine. J’ai tout de suite voulu tout changer en commençant par moi, mes habitudes, mes priorités.

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Hamac, moustiquaire, bâche : chaque jour, Arthur Germain bivouaque à quelques mètres de la Seine

Aujourd’hui, que cherches-tu à montrer ?

Arthur Germain : Je veux que ces 52 jours soient une invitation à venir découvrir ce qu’est la nature pour comprendre ce que nous devons protéger. Par cette aventure, je veux montrer que l'écologie, ce ne sont pas des contraintes mais au contraire, des façons nouvelles de voir le monde qui nous entoure. En nous mobilisant ensemble par des gestes du quotidien, nous avons tout à gagner. Une fois qu’on a compris cela, tout le monde est à même de porter ses propres messages avec ses propres initiatives. Je suis optimiste sur la sensibilité de la société aux discours, il faut maintenant lui montrer que c’est possible d’agir au quotidien. En me voyant relever ce défi, j'aimerais que les gens se posent certaines questions avant de consommer des objets en tout genre (vêtements, outils, meubles…) « Est-ce que j'en ai vraiment besoin ? Est-ce que je peux le fabriquer, ou demander à un voisin s'il peut m'aider ? » Ce que j'aime bien avec ce genre de questionnement c'est que l'on a en général seulement besoin de notre créativité pour y répondre. Il faut que les gens prennent conscience qu'on a tout autour de nous, et que ce qu'il nous manque c'est l'imagination et la débrouille.

En 2018, à 16 ans, tu deviens le plus jeune Français à traverser la Manche. Comment est né ton amour pour l’eau et la natation ?

Arthur Germain : La traversée de la Manche a été une étape très cruciale de ma vie. Je me suis prouvé que je n'étais pas seulement un nageur de bassin, pas seulement un compétiteur. J’ai surmonté plusieurs échecs en natation, en bassin comme en eau libre et mes rêves de succès aux championnats de France, de qualifications aux JO se sont éloignés… Mais j’ai voulu faire de ces épisodes des forces. Aujourd’hui, je suis davantage fasciné par tout ce que la natation peut me permettre d’atteindre. Sur un plan humain d’abord, avec des rencontres qui ont changé ma vie comme celle avec Sébastien Payet, mon coach mental qui m’a enseigné ses pratiques en phase de préparation pour la traversée de la Manche. Il ne m’a pas seulement appris à me dépasser, il a changé ma façon de voir la vie.

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Arthur Germain descend la Seine en tirant son kayak, dans lequel il entrepose tout le matériel nécessaire à son aventure.

Physiquement, mentalement… peux-tu nous présenter ta préparation ?

Arthur Germain : Je prépare à la fois l’aspect purement sportif en nageant et en faisant du sport une fois par jour mais je consacre également beaucoup de temps à m’acclimater à l’autonomie. Je pars souvent avec des amis dans la forêt pour leur faire découvrir ce que je fais. Une fois par semaine je dors en forêt ce qui me permet aussi de couper avec tout l’aspect administratif du projet… Parce qu’au final, je passe 4h par jour à répondre à des mails, un travail non négligeable.

Concrètement, comment vas-tu vivre ce défi au jour le jour ?

Arthur Germain : Je prévois de nager environ 15 km par jour, bien que plusieurs facteurs puissent modifier ce plan type : la météo, les différents obstacles du parcours comme les écluses ou les barrages que je vais devoir contourner avec mes 90 kg de matériel. Ensuite je passerai du temps à préparer mon campement pour la nuit, chercher du bois, faire mon feu, me tenir au courant des bulletins météos. Toutes les journées ne se ressembleront pas : une fois passée l'écluse de Poses à Amfreville-sous-les-Monts, dernière écluse de la Seine, j’aurai parfois le courant contre moi avec la marée qui remonte, et il y aura donc des jours ou je nagerai moins.

citation« Il m’est arrivé de me retrouver au milieu de l’eau avec un kayak de 90 kg en train de couler, tout seul à 10 km de la route, dans une eau à 5 degrés. »

Y a-t-il eu des imprévus ou des choses qui t'ont surpris ?

Arthur Germain : Il m’arrive régulièrement des choses un peu folles. J’essaye parfois de me mettre en difficulté pour être prêt à faire face à toute épreuve. Il m’est arrivé de me retrouver au milieu de l’eau avec un kayak de 90 kg en train de couler, tout seul à 10 km de la route, dans une eau à 5 degrés. Mais au-delà des imprévus naturels, je me confronte aux imprévus administratifs ! Ce qui m’impressionne le plus ce sont les boucles mail avec plus de 50 personnes pour obtenir les autorisations de traversée sur mon parcours.

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Arthur Germain en pleine préparation du kayak, un préalable avant chaque mise à l’eau

Tu vas passer une grande partie de ton temps en forêt, à dormir entre les arbres : c’est un élément dans lequel tu te plais ?

Arthur Germain : Je suis très attiré par les éléments naturels, la forêt, la montagne… Je m'y sens bien et c’est vital pour moi de m’y retrouver une fois par semaine, de me réveiller avec des bruits d'oiseaux. Pour autant je dois reconnaître que ça ne sera pas simple d’être sans ma famille ni ma compagne pendant 52 jours. Mais je ne suis pas seul : je me sens soutenu par mes proches et par toutes les personnes qui ont répondu favorablement à mon appel sur les réseaux sociaux pour m’offrir de l’eau potable, une douche, le droit de dormir sur un terrain privé pendant mon aventure… D’une manière générale, j’ai hâte de découvrir tous ces paysages depuis l’eau, ce chemin historique de la Seine à travers les vallons, les champs, forêts denses, l’agglomération parisienne, l’écluse… On a des paysages magnifiques, j'espère donner envie aux gens de découvrir le fleuve.

Enfin… un conseil pour ceux qui souhaiteraient se jeter à l’eau ?

Arthur Germain : Lancez-vous ! Il faut expérimenter ! On met le premier doigt de pied dans l’eau et on se dit que « c’est froid ». Mais il faut commencer par comprendre ce qu’est la sensation de froid. Aller dans l’eau c’est une manière de comprendre comment fonctionne son corps en pleine nature, et comprendre d’une manière plus globale son environnement. On ne peut pas être un nageur d’eau libre sans se renseigner sur l’impact de notre passage sur l’écosystème. Essayez, et renseignez-vous sur les pratiques, ça vaut le coup. Entre le moment où on est dehors et dedans, il y a un monde de différence.

Plus d'informations sur le site la Seine à la nage.

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