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Arthur Germain : « On peut faire des trucs cool en étant profondément écolo »

23 mars 2022 - Estelle Papillon - Temps de lecture : 5 min

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À 21 ans seulement, l’aventurier Arthur Germain enchaîne les exploits et sort un documentaire. Souvenez-vous l’été dernier, nous suivions ses exploits dans sa descente en solitaire des 784 kilomètres de la Seine à la nage. Près de huit mois après son arrivée au Havre, ce sportif passionné de nature et engagé pour la cause environnementale témoigne en exclusivité pour En Lumière sur son parcours et ses prochains défis. 

Huit mois après la fin de ton défi de descendre la Seine à la nage, que retiens-tu de cette aventure ?

Arthur Germain : Cette aventure a été très forte, encore aujourd’hui j’en parle avec beaucoup d’émotion. J’ai vécu ces deux mois de périple comme deux années de vie et de rencontres. Tout a été tellement intense ! Chaque jour il y avait quelque chose d'incroyable mais ce qui m’a le plus marqué, ce sont les rencontres que j’ai pu faire. Elles ont véritablement transformé quelque chose dans ma vie de tous les jours, elles m’ont permis de m’ouvrir sur le monde et sur les autres. Lorsque je nageais la journée, parfois jusqu’à huit heures par jour, j’étais seul, comme dans une bulle. Mais à chaque pause, chaque étape de bivouac, je rencontrais des inconnus incroyables avec qui j’ai pu avoir des discussions très profondes. J’ai découvert une sincérité et une humanité que je n’avais jamais découvert auparavant.

Quelle est la rencontre qui t’a le plus marquée ?

Arthur Germain : Il y a des centaines de rencontres que j’aimerais vous raconter. Si je devais en choisir une, c’est une rencontre à Giverny le 38ème jour de l’aventure après une longue journée. Après 18 kilomètres de nage, j’étais épuisé et je ne trouvais aucun endroit pour poser ma tente quand je vois un beau jardin qui donne sur les berges de Seine. Je monte mon matériel sur la berge et je traverse la propriété pour demander la permission au propriétaire de passer la nuit dans son jardin. Personne. Tout est fermé. Je me suis dit tant pis, je dors là de toute façon je n’ai pas la force d’aller plus loin. Le matin, je me fais réveiller par un bruit de moteur… et là ! Je vois tous les volets roulants de la maison se relever avec un monsieur en train de faire couler son café dans sa cuisine. Je me dépêche de ranger mes affaires pour aller sonner à sa porte et lui expliquer ce que je fais dans son jardin. Le monsieur m’ouvre mais il faut vous imaginer la scène… j’ai les cheveux dans tous les sens, je suis en short, pieds nus, pas lavé après une nuit dans l’herbe (rires). Heureusement, il avait entendu parler de mon périple, alors il m’invite à prendre un café et comme une belle rencontre n’arrive pas seule, c’était l’anniversaire de son fils de 11 ans. Le petit William était le plus heureux du monde d’avoir « un aventurier » à la maison pour son anniversaire ! 

Comment s’est passé le retour sur terre ?

Arthur Germain : Après deux mois dans l’eau, on peut parler de retour sur terre oui ! À dire vrai, j’ai eu une grosse période de transition, plutôt loin de Paris. Je suis parti en Creuse pendant un mois car je ne me voyais pas reprendre ma vie d’avant, je veux dire une vie à la capitale, tout de suite. Vivre deux mois dans la nature, dans une certaine solitude, faisait que je ne pouvais pas revenir à la vie normale n'importe comment. En 2018, après ma traversée de la Manche à la nage, j’ai vécu une année très difficile. Un sentiment de vide. Lorsqu’on se lance dans ce genre d’aventure, on y pense toute la journée, on en rêve toutes les nuits ! Pour la Seine, cela a été légèrement différent car au-delà de l’exploit sportif je savais qu’il y aurait un après. Ces 784 kilomètres n’étaient que le début d’une aventure plus grande. J’ai créé mon association, je travaille sur l’écriture de mon livre, le documentaire de l’aventure vient de sortir et je propose des aventures en pleine nature pour des petits groupes depuis peu…

 

Justement, peux-tu nous en dire plus sur tes prochaines aventures ?

Arthur Germain : Mes deux nouveaux défis reprennent complètement les messages que j’ai souhaité porter durant l’aventure de la Seine à la nage. Ce qui m'intéressait c’était l’autonomie, ce nouveau mode de vie très différent, mais aussi de rendre l’écologie plus joyeuse et je vais continuer à faire avancer ces idées. Le but c’est d’avoir des objectifs positifs en tête. C’est pourquoi j’ai lancé les Rand’eau, des excursions en autonomie totale dans la nature pour vous, vos proches, vos lecteurs ! Je propose plusieurs aventures pour des petits groupes familiaux mais aussi des entreprises (5 à 10 personnes) comme une nuit en forêt pour apprendre à faire du feu et monter un camp ou bien un weekend complet de survie avec nage en eau libre et bivouac sur une île déserte de la Seine… Je veux que les gens aient ce rapport privilégié à l’eau car c’est ce qui m’a sensibilisé aux causes environnementales. Tout l’intérêt de ces excursions est d’apprendre à vivre dans la nature, pour ça il ne s’agit pas toujours d’aller bien loin. Je récupère mes camarades d’expédition à une station de RER en général, on part en pleine forêt, on marche, on nage, on dort à la belle étoile à la belle saison et je les laisse une ou deux stations de RER plus loin. Pourtant je vous assure que le dépaysement est total ! En parallèle, je travaille sur un projet de maison 100 % autonome et pédagogique où les curieux pourront venir vivre et expérimenter de nouveaux modes de vie. Je veux montrer qu’on peut faire des trucs cool tout en étant profondément écolo. 

Ta vision de l’écologie a-t-elle évolué pendant et après ton aventure ?

Arthur Germain : Je dirais que ça a renforcé ma conviction, les gens attendent de l’écologie qu’elle améliore leur bien-être. Quand on associe bien-être et écologie, les gens ont envie de s’y mettre. Malheureusement ce n’est pas le discours qui prédomine, on ne parle pas d’écologie de la bonne manière et c’est pour cette raison qu’elle passe trop souvent au second plan. Je suis d’ailleurs très heureux que le documentaire sur l’aventure sorte en ce moment si ça peut donner envie aux gens qu’on parle d’écologie d’une autre manière… ce sera gagné !

Dans ta vie de tous les jours, as-tu changé certaines habitudes ?

Arthur Germain : Oui et je pense qu’on ne peut que réaliser l’ampleur du gaspillage quand on doit vivre avec le minimum vital pendant 49 jours. Je me suis notamment rendu compte que j’utilisais beaucoup trop d’eau. Mais on revient très vite aux habitudes… Pendant l'aventure je tournais à 3 litres d’eau potable par jour environ. Je vivais très mal chaque goutte qui tombait à côté de mes récipients car je craignais de manquer d’eau potable. Quand je fais la vaisselle maintenant je coupe l’eau ce que je ne faisais jamais avant. C’est tout bête mais c’est déjà beaucoup. En moyenne, nous consommons 110 litres d’eau par personne et par jour en France. Pendant 49 jours, j’étais à moins de 5 litres… 

Un documentaire vient de sortir sur ton aventure, que pouvons-nous y découvrir ? Quels sont les messages qui en ressortent ?

Arthur Germain : L’idée était de retranscrire l’aventure mais surtout de montrer la Seine dans son ensemble, de sa source à son estuaire, dans toute sa beauté mais aussi toute sa fragilité. Il faut absolument casser l’idée que la Seine est une poubelle, à Paris comme ailleurs. Nager dans la Seine, c’est peut-être aussi dire aux gens de ne plus y jeter n’importe quoi. Qui jetterait des mégots ou des sacs de fast food dans son bain ou à la piscine ? L’enjeu environnemental a dès le début de l’aventure été le cœur du projet et le documentaire montre à quel point il est urgent de protéger non seulement les paysages mais aussi tout ce qui ne se voit pas… ou peu. Et je pense notamment à l’eau, qui au-delà des déchets visibles, est exposée à diverses formes de pollution. J’ai par exemple effectué des prélèvements tout au long de mon parcours afin de nourrir les analyses des scientifiques sur ce sujet. Enfin ce documentaire vise à montrer que vivre de manière écolo ne veut pas dire vivre mal. Au contraire, c’est vivre bien !

Crédits photo : François Guillotte

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